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Point sur la recherche à fin 2015

Posté : 25 mars 2016, 18:30
par Nadine MESLET
bonjour,

Si vous n'avez pas lu la lettre 2015 :

Veille scientifique 2015 au sujet de la pancréatite héréditaire, par le Dr. Vinciane Rebours.
En 2015, des articles sont parus pour essayer de comprendre les mécanismes en cause au cours des pancréatites liées à des mutations génétiques. Un travail a notamment essayé de comprendre les modifications de fonctionnement liées aux mutations du gène CTRC, codant pour la chymotrypsine C. La chymotrypsine C est une enzyme qui joue un rôle dans la digestion des protéines et des mutations entraînent un gain de fonction, c’est à dire une hyperactivation de cette enzyme.

Comme vous le savez, peu de traitements sont disponibles à ce jour et nous attendons avec impatience les résultats de l’essai EUROPAC2 sur l’effet au long cours des anti-oxydants pour limiter le nombre et l’intensité des crises douloureuses. Les inclusions sont terminées. 240 patients ont participé à cette étude et nous les remercions. Cet essai thérapeutique européen étudiait l’effet des traitements anti oxydants (vitamine C, Sélénium, béta carotène…) ou à base de magnésium chez les patients ayant une pancréatite chronique héréditaire douloureuse. En attendant les résultats qui ne seront pas disponibles avant 15 mois, voici les données d’une méta-analyse parue cette année sur ce sujet. Une méta-analyse est la compilation de tous les résultats de plusieurs études qui traitent d’un même sujet. 8 études étaient compilées, soit 446 patients avec une pancréatite chronique alcoolique ou non alcoolique. 234 patients recevaient un traitement anti oxydant et 212 patients n’en recevaient pas. On notait un diminution significative des douleurs dans le groupe traité en comparaison avec les patients non traités (RR, 0.73; 95% CI, 0.58-0.91; P = 0.006). En faisant des analyses de sous-groupes, cette diminution était observée dans le groupe des pancréatites alcooliques et dans le groupe des pancréatites non alcooliques. Ce résultat est très encourageant car un traitement anti-oxydant est facile à prendre sans réel effet secondaire potentiel.

Une deuxième étude a analysé l’intérêt de traitement par endoscopie chez les enfants pour limiter les douleurs. 12 enfants ont participé à cette étude. Tous avaient une pancréatite héréditaire avec de multiples poussées douloureuses. Une analyse fine du pancréas était faite par IRM pour comprendre les lésions du pancréas qui pouvaient être à l’origine des douleurs, notamment des calcifications qui obstruent le canal principal du pancréas (canal de Wirsung). En cas d’obstruction du canal par des calcifications, une CPRE était faite, c’est à dire un examen sous anesthésie générale qui permet de rentrer dans le canal principal via les voies naturelles.

Une prothèse pancréatique était posée dans le canal principal pendant 12 mois (un tube en plastique) pour laisser ouvert le canal et permettre un meilleur écoulement des sécrétions pancréatiques. Après un suivi de 3 ans, tous les enfants traités n’avaient pas récidivé des douleurs et ils pouvaient tous suivre une activité quotidienne normale.
L’endoscopie est parfois une bonne alternative qui peut permettre de passer un cap. Cependant il faut bien poser l’indication et bien sélectionner les patients qui pourraient en tirer un bénéfice.
Il est important de se renseigner et d’être pris en charge dans un centre expert qui a l’expérience de cette maladie et de ce traitement.
Dr Vinciane Rebours,
Service de Gastroentérologie et Pancréatologie.
Hôpital BEAUJON, Clichy (92110). vinciane.rebours@aphp.fr

Référence
1/ Antioxidant Therapy for Pain Reduction in Patients With Chronic Pancreatitis- A Systematic Review and Meta-analysis. Tarun Rustagi and Basile Njei. Pancreas 2015;44: 812–818.
2/ Therapeutic step-up strategy for management of hereditary pancreatitis in children. Kargl S, Kienbauer M, Duba H, Schöfl, Pumberger. J Pediatr Surg. 2015 Apr;50(4):511-4.

Re: Point sur la recherche à fin 2015

Posté : 13 juin 2018, 11:49
par Nadine MESLET
21/03/2016 par le Dr A.Bouling Résumé des recherches en génétique Réalisées à l’unité INSERM UMR1078 (Brest) depuis septembre 2015.
Sur le plan diagnostic :
Identification de nouvelles mutations dans les familles PCH.
Recherche du nouveau gène CEL responsable de PCH (voir compte rendu précédent) chez les familles pour lesquelles aucune mutation n’a été identifiée. Ce gène a été retrouvé dans 4 familles françaises. Il en reste encore une trentaine de familles pour lesquelles aucune cause n’a été identifiée.
Par ailleurs, nous avons identifié une nouvelle forme de ce gène CEL dans les populations asiatiques, mais celle-ci n’a aucun effet néfaste et ne représente pas un risque de développer une pancréatite.
Références :
Zou WB, Boulling A, Masamune A, Issarapu P, Masson E, Wu H, Sun XT, Hu LH, Zhou DZ, He L, Fichou Y, Nakano E, Hamada S, Kakuta Y, Kume K, Isayama H, Paliwal S, Mani KR, Bhaskar S, Cooper DN, Férec C, Shimosegawa T, Chandak GR, Chen JM, Li ZS, Liao Z. No Association Between CEL-HYB Hybrid Allele and Chronic Pancreatitis in Asian Populations. Gastroenterology. 2016 Mar 2. pii: S0016-5085(16)00292-4.

Recherche de nouvelles mutations dans les régions inexplorées du gène SPINK1
Nous avons analysé toutes les mutations localisées dans les régions profondes du gène SPINK1. Aucune d’entre elles ne semble jouer un rôle dans la pancréatite.
Références :
Zou WB, Masson E, Boulling A, Cooper DN, Li ZS, Liao Z, Férec C, Chen JM. Digging deeper into the intronic sequences of the SPINK1 gene. Gut. 2016 Feb 16. pii: gutjnl-2016-311428.
Zou WB, Boulling A, Masson E, Cooper DN, Liao Z, Li ZS, Férec C, Chen JM. Clarifying the clinical relevance of SPINK1 intronic variants in chronic pancreatitis. Gut. 2015 Dec 30.

Sur le plan thérapeutique :
Le projet de criblage pharmacologique sur modèle levure vient de démarrer.
La première étape devrait être finie avant l’été. On saura à ce moment-là si le projet peut continuer ou s’il doit être abandonné.
Pour rappel, ce projet comprend 2 grandes étapes :
Etape 1 : Construction d’un système de criblage de médicaments à l’aide de levures
Si le système fonctionne, on passe à l’étape 2
Etape 2 : Utilisation du système pour identifier quelques molécules potentiellement intéressantes dans le cadre de la pancréatite
Si nous arrivons à identifier quelques molécules intéressantes avec ce système, il sera alors nécessaire de réaliser encore de nombreux tests avec d’autres modèles.
Ces nouveaux tests seront nécessaires pour bien caractériser ces molécules, avant d’envisager de réaliser des essais sur l’homme.


Compte rendu des recherches INSERM - UMR1078, Brest (avril à septembre 2016) par le Dr A.Bouling
Amélioration du diagnostic moléculaire de la pancréatite chronique
Publication d’une communication dans le journal Human Mutation

Nous avons récemment recherché des mutations dans le promoteur du gène PRSS1 afin d’identifier de nouveaux facteurs de risque génétiques pour la pancréatite chronique. En effet, le promoteur d’un gène est la région qui permet de contrôler son niveau d’expression. Cela signifie que des mutations altérant la fonction du promoteur de PRSS1 peuvent augmenter ou diminuer la quantité de trypsine produite dans le pancréas, d’où l’intérêt de rechercher des mutations dans cette région en particulier.
Ce travail n’a pas permis d’identifier de nouveaux facteurs de risque, toutefois, nous avons découvert un variant rare conférant un effet protecteur fort (c’est-à-dire qu’il diminue la probabilité qu’un individu développe une pancréatite). Cette variation génétique a été retrouvée chez un individu en bonne santé, ce qui est compatible avec un effet protecteur de celle-ci. Dans le contexte de la pancréatite chronique héréditaire (PCH), il serait intéressant de voir si la présence de tels facteurs permet ou non d’expliquer que, au sein d’une même famille souffrant de PCH, tous les porteurs d’une mutation (comme la PRSS1 R122H par exemple) ne développent pas toujours la maladie.
Référence
Boulling A, Abrantes A, Masson E, Cooper DN, Robaszkiewicz M, Chen JM, Férec C. Discovery and Functional Annotation of PRSS1 Promoter Variants in Chronic Pancreatitis. Human Mutation 2016 Jul 18.
Résumé (anglais)
Octobre 2016 :
Projet thérapeutique en modèle levure
Pour rappel, ce projet comprend 2 grandes étapes :
Etape 1 : Construction d’un système de criblage de médicaments à l’aide de levures
Si le système fonctionne, on passe à l’étape 2
Etape 2 : Utilisation du système pour identifier quelques molécules potentiellement intéressantes dans le cadre de la pancréatite
Nous sommes actuellement à l’étape 1. Son but consiste à introduire la trypsine humaine dans la levure, en espérant que celle-ci va la « détruire », un peu comme c’est le cas dans les cellules du pancréas humain quand la trypsine s’active accidentellement (à cause d’une mutation par exemple). De ce fait, il sera possible de tester des petites molécules sur ces levures pour voir si elles peuvent stopper leur mort. Pour le moment nous avons introduit avec succès la trypsine dans la levure, et celle-ci est correctement exprimée. Par contre, elle ne semble avoir aucun effet sur les levures, ce qui pose un problème, car si la trypsine ne tue pas les levures, il est impossible d’observer l’effet d’une molécule sur la survie de ces dernières (et donc de déduire que la molécule en question a peut-être un effet inhibiteur sur la trypsine).
Cette absence d’effet peut s’expliquer de diverses manières :
La trypsine humaine produite par la levure dans nos conditions d’expérimentation n’est pas exactement la même que celle produite par une cellule humaine.
Le milieu intra-cellulaire de la levure (c'est-à-dire le liquide qui « remplit » la levure) ne possède pas les mêmes propriétés que celui de la cellule du pancréas humain. Le pH, la concentration en calcium etc.. de ce milieu peuvent effectivement influer sur l’activité de la trypsine.
Autres spécificités du modèle levure (mécanisme de défense contre la trypsine…)
Nous travaillons actuellement pour solutionner ce problème.

Veille scientifique 2016 au sujet de la pancréatite héréditaire
La définition de la pancréatite chronique héréditaire retenue par la communauté scientifique est :
1/ soit être porteur d’une mutation du gène PRSS1. Ce gène se situe sur le chromosome 7 et régule l’activité d’une protéine pancréatique: le trypsinogène cationique. La transmission des mutations est autosomique dominante, c'est-à-dire qu’elle se fait par un parent unique et est suffisante pour donner des symptômes de pancréatite.
2/ soit avoir des critères généalogiques: être porteur d’une pancréatite chronique idiopathique (c'est-à-dire sans cause de pancréatite connue et trouvée: pas d’alcoolisme chronique, pas de troubles de la régulation des triglycérides, du calcium et du phosphore…) avec des antécédents familiaux de pancréatite idiopathique : 2 parents malades au premier degré ou 3 parents malades au 2° degré.
Cela signifie qu’il existe d’autres gènes impliqués dans les pancréatites héréditaires, comme SPINK1, CTRC ou CFTR.
SPINK1 est un gène qui code pour une protéine régulatrice de l’activation des enzymes pancréatiques. En cas de mutations cela entraîne une cascade enzymatique anarchique et des pancréatites à répétition.
CFTR est impliqué dans la mucoviscidose. En cas de mutation, il existe des répercussions autres que pulmonaires et notamment pancréatiques. Ce gène code pour un canal qui transporte le chlore dans les canaux du pancréas. Ces canaux chlore sont indispensables pour assurer une bonne sécrétion du liquide pancréatique qui lui, permet une bonne activation des enzymes pancréatiques.
CTRC est le gène le moins bien connu car il a été découvert il y a 6 ans seulement. Ses mécanismes physiopathologiques sont encore en cours d’analyse. Il apparaît cependant qu’une mutation unique de ce gène pourrait être suffisante pour développer une pancréatite génétique. Ce gène code pour une protéine qui permet de limiter l’activité des enzymes pancréatiques. Quand une mutation est présente, la régulation est défaillante et les enzymes pancréatiques sont activées en permanence et provoquent des pancréatites aiguës à répétition.
Deux études rapportent les mutations de gènes trouvées chez des enfants présentant des pancréatites récidivantes. Dans une étude japonaise, parmi 128 patients mineurs inclus dans ce travail, 50 patients (39%) avaient au moins une mutation génétique. Parmi ces 50 patients, seuls 15 avaient également des antécédents familiaux de pancréatite. L’âge de début des symptômes était 7 ans. Les mutations trouvées portaient sur le gène PRSS1 pour 26 patients, le gène SPINK1 pour 23 patients, CTRC pour 3 patients, CPA1 pour 5 patients. En cas de mutations de SPINK1, CTRC et CPA1, 51% des patients avaient plusieurs mutations soient à l’état homozygote, soit à l’état hétérozygote. Dans la deuxième étude Américaine, les gènes testés chez les enfants étaient PRSS1, SPINK1 et CFTR. 91 enfants ont participé à ce travail. 36% avaient au moins une mutation présente. Les mutations trouvées étaient PRSS1 (7 patients), CFTR (21 patients), SPINK1 (3 patients), SPINK+CFTR (2 patients).
On constate donc que les mutations peuvent s’associer, ce qui explique que les symptômes sont parfois plus ou moins forts chez les patients. Cependant il n’existe pas de règle et pour 2 patients présentant les mêmes mutations des mêmes gènes, les symptômes peuvent très différents avec des répercussions très différentes sur le pancréas (présence ou non de calcifications….). Cela sous-tend qu’il existe d’autres facteurs de régulation qui ne sont pas encore connus :
1/ soit la présence d’autres mutations non connues sur d’autres gènes
2/ soit la présence de mutations (ou de variations) sur la partie « non codante » (introns) ou « promotrice » du gène muté. Cela impliquerait que la mutation s’exprime ou non en raison des modifications de la partie promotrice du gène
3/ soit des modifications « épigénétiques » des gènes mutés. C’est à dire des modifications dans l'activité des gènes, n'impliquant pas de modification de la séquence d'ADN et pouvant être transmis lors des divisions cellulaires. Contrairement aux mutations qui affectent la séquence d'ADN, les modifications épigénétiques sont réversibles. Ces modifications sont liées et propre à chaque individu et pourrait expliquer que des mutations s’expriment plus ou moins fortement d’un patient à l’autre.
Pr Vinciane Rebours, service de Gastroentérologie et Pancréatologie.
Hôpital BEAUJON, Clichy (92110). vinciane.rebours@aphp.fr
Référence
1/ Vue PM, McFann K, Narkewicz MR. Genetic Mutations in Pediatric Pancreatitis. Pancreas. 2016 Aug;45(7):992-6.
2/ J Pediatr Gastroenterol Nutr. 2016 Oct;63(4):431-6.
Genetic Analysis of Japanese Children With Acute Recurrent and Chronic Pancreatitis.
Saito N1, Suzuki M, Sakurai Y, Nakano S, Naritaka N, Minowa K, Sai JK, Shimizu T

Re: Point sur la recherche au fil des années

Posté : 13 juin 2018, 11:51
par Nadine MESLET
2017 Recherche– Bilan sur l’activité diagnostique réalisée à Brest dans le cadre de la pancréatite chronique (09/11/2017)
Cela fait maintenant un peu plus de 20 ans que notre laboratoire INSERM basé à Brest mène des recherches en génétique sur la pancréatite chronique. Nous avons fait beaucoup de progrès dans la compréhension de cette maladie, et je vous propose de faire un bilan sur l’efficacité du diagnostic moléculaire que nous réalisons pour la pancréatite chronique.

Bilan sur le diagnostic des pancréatites chroniques héréditaires :
Depuis la découverte d’un premier gène responsable en 1996 par le Pr. Férec à Brest et le Pr. Whitcomb aux Etats Unis, beaucoup de progrès ont été fait dans la compréhension de la génétique de la pancréatite chronique héréditaire.
En un peu plus de 20 ans, nous avons analysé dans notre service de génétique à Brest l’ADN d’individus appartenant à 99 familles françaises souffrant de pancréatite chronique héréditaire.
Pour qu’une pancréatite chronique soit considérée héréditaire, il faut qu’au moins 3 individus soient atteints dans la même famille, sur au moins 2 générations.
Chez ces 99 familles, nous avons pu identifier une mutation clairement responsable de la maladie pour 65 d’entre elles, soit 65.7% de cas positifs.
Il reste donc un tiers des familles pour lesquelles nous n’avons toujours pas d’explication.

Bilan sur le diagnostic des pancréatites chroniques idiopathiques
Une pancréatite chronique dite idiopathique est une pancréatite chronique pour laquelle il n’y a aucune cause identifiée. Les personnes concernées n’ont pas une consommation excessive d’alcool. Egalement, ce type de pancréatite chronique ne survient pas dans un contexte familial, ce qui permet d’exclure une cause héréditaire.
Pour autant, on retrouve de manière assez fréquente des mutations génétiques pouvant favoriser la survenue d’une pancréatite chronique idiopathique, mais qui ne sont pas responsable à elles seules de la maladie.

Nous avons réalisé un bilan des mutations génétiques identifiées sur les gènes PRSS1, SPINK1 et CTRC dans les cas de pancréatites chroniques idiopathiques analysés dans notre service de génétique à Brest, de mars 2015 à octobre 2017.
Sur un total de 1654 patients, 153 portent une mutation facteur de risque sur l’un de ces 3 gènes, soit un total de 9.3 % de cas positifs. On notera que 4 de ces patients sont porteurs de deux mutations.

Il reste donc probablement de nombreux facteurs de risques génétiques à identifier, et on ne peut exclure un rôle joué par des facteurs environnementaux non identifiés.

Dr.Arnaud Boulling



Veille scientifique 2017 au sujet de la pancréatite héréditaire
Pour rappel, la définition de la pancréatite héréditaire retenue est
1/ soit être porteur d’une mutation du gène PRSS1.
Ce gène se situe sur le chromosome 7 et régule l’activité d’une protéine pancréatique: le trypsinogène cationique.
La transmission des mutations est autosomique dominante, c'est-à-dire qu’elle se fait par un parent unique et est suffisante pour donner des symptômes de pancréatite.
2/ soit avoir des critères généalogiques: être porteur d’une pancréatite chronique idiopathique (c'est-à-dire sans cause de pancréatite connue et trouvée: pas d’alcoolisme chronique, pas de troubles de la régulation des triglycérides, du calcium et du phosphore…) avec des antécédents familiaux de pancréatite idiopathique : --2 parents malades au premier degré ou -3 parents malades au 2° degré.
A ce jour, nous ne connaissons pas tous les gènes impliqués dans le développement des pancréatites et pour certains patients, les analyses génétiques sont négatives, c’est à dire que nous ne trouvons pas d’anomalies pour les gènes connus en 2017.
Ces gènes sont PRSS1 mais aussi SPINK1, CTRC ou CFTR.
Cela signifie qu’il existe d’autres gènes impliqués dans les pancréatites héréditaires, qu’il faut découvrir.
Depuis l’essor des techniques de séquençage du génome, il est possible maintenant d’analyser l’ensemble des gènes des patients, pour chercher des mutations ou de simples variations du code génétique. Ces analyses sont faites de plus en plus fréquemment dans de grandes cohortes de patients ayant une pancréatite :
- soit des cohortes de patients avec une cause connue de pancréatite (alcoolique notamment) pour savoir si ces patients ont un « terrain » génétique prédisposant au développement de la pancréatite en plus du facteur de risque connu.
- soit des cohortes de patients ayant une pancréatite de cause inconnue pour chercher des anomalies génétiques nouvelles qui pourraient expliquer le développement de la pancréatite.
Ainsi cette année, une grande étude génétique européenne a été réalisée chez des patients issus de grandes équipes européennes afin de chercher des anomalies génétiques. Les groupes étudiés étaient
- 1959 patients avec une pancréatite chronique alcoolique, 4708 patients sans maladie pancréatique (patients dits « témoins ») et 1332 patients ayant une consommation excessive d’alcool sans pancréatite.
- 1650 patients avec une pancréatite non alcoolique et 6695 patients dits témoins.
Il a été mis en évidence de nouvelles anomalies génétiques de prédisposition à la pancréatite, notamment des anomalies des gènes (CTRB1 et CTRB2) codant pour le chymotrypsinogène.
Le chymotrypsinogène est une proenzyme (c’est à dire une enzyme pas encore activée) de la chymotrypsine, qui une enzyme digestive.
Ces gènes se situent sur le chromosome 16. La chymotrypsine agit dans le tube digestif (duodénum) permettant la digestion de certaines protéines.

De même, il a été découvert des variations de code génétique plus fréquentes en cas de pancréatite.
La particularité de ces variations était qu’elle intéressait des parties du génome que l’on dit « non codant ». C’est à dire des parties du génome qui ne sont pas sensées s’exprimer.

Au final ces régions ont probablement un rôle de régulation, ce qui explique qu’en cas de variations, les parties « dites codantes » s’expriment moins bien ou mal.

Petit mémo génétique :
SPINK1 est un gène qui code pour une protéine régulatrice de l’activation des enzymes pancréatiques.
En cas de mutations cela entraîne une cascade enzymatique anarchique et des pancréatites à répétition.
CFTR est impliqué dans la mucoviscidose.
En cas de mutation, il existe des répercussions autres que pulmonaires et notamment pancréatiques.
Ce gène code pour un canal qui transporte le chlore dans les canaux du pancréas.
Ces canaux chlore sont indispensables pour assurer une bonne sécrétion du liquide pancréatique qui lui, permet une bonne activation des enzymes pancréatiques.
CTRC est le gène le moins bien connu car il a été découvert il y a 6 ans seulement. Ses mécanismes physiopathologiques sont encore en cours d’analyse.
Il apparaît cependant qu’une mutation unique de ce gène pourrait être suffisante pour développer une pancréatite génétique.
Ce gène code pour une protéine qui permet de limiter l’activité des enzymes pancréatiques.
Quand une mutation est présente, la régulation est défaillante et les enzymes pancréatiques sont activées en permanence et provoquent des pancréatites aiguës à répétition.

Je vous souhaite de très belles fêtes de fin d’année.
Bien à vous
Pr Vinciane Rebours,
service de Gastroentérologie et Pancréatologie.
Hôpital BEAUJON, Clichy (92110). vinciane.rebours@aphp.fr

Référence
Genome-wide association study identi es inversion in the CTRB1-CTRB2 locus to modify risk for alcoholic and non-alcoholic chronic pancreatitis. Rosendahl J, et al. Gut 2017;0:1–9.